L’alpinisme canin est une discipline rare et de ce fait peu documentée. Lorsque l’on songe à passer ce cap, il est logique de s’interroger : la faisabilité, l’entrainement, les réactions physiologiques à l’altitude, le matériel, etc. Autant de questions que nous nous étions posées à l’époque où nous avions envisagé de poursuivre au delà de la randonnée alpine avec Helly et auxquelles nous n’avons trouvé que très peu de réponses. C’est donc ici de notre expérience qu’il s’agit et que l’on vous propose en toute humilité pour vous aider à vous lancer et ainsi suivre les traces d’Helly sur les géants des Alpes.
- Passer la barre des 4000, impossible ?
- Le matériel pour l’alpinisme avec un chien
- L’entrainement
- Les conseils avisés
- La liste de nos ascensions et le mot de la fin
Passer la barre des 4000m avec un chien, impossible ?
C’est probablement ce que l’on vous dira. Lorsque l’on se demandait il y a quelques années ne serait-ce que la possibilité d’atteindre le sommet de la Grande Sassière, 3750m d’altitude, dans de bonnes conditions avec un chien, on s’était fait lyncher sur les réseaux sociaux : “vous allez tuer votre chienne, c’est irresponsable, c’est inconscient, même les vétos chamoniards disent qu’il ne faut pas dépasser les 3500m, etc.”
Pour autant, nous avions déjà à notre actif et surtout à celui d’Helly une bonne vingtaine de 3000m pour lesquels elle n’avait jamais montré de signes de faiblesse particuliers.
Nous avons donc choisi de persévérer : nous atteindrons sans difficulté le sommet de la Grande Sassière, plus haute randonnée d’Europe accessible uniquement l’été et le Barrhorn suisse à 3610m. En parallèle et par l’adaptation à la haute montagne que nous affectionnons particulièrement, nous nous sommes équipés pour sécuriser la chienne en cherchant le matériel et les stratégies possibles en fonction du type de terrain technique qui se présentait à nous.
Pendant ces années de conquête des 3000m, nous en profiterons également pour faire un stage d’alpinisme puis un premier sommet de 4000m sans chien. Il nous semblait nécessaire de se mesurer à ce type de discipline sans Helly afin d’appréhender nos propres réactions, expérimenter et déterminer si nous serions en mesure de franchir le cap de l’emmener avec nous.
C’est ce que l’on fera l’année suivante aux côtés de François, guide de haute montagne, que nous ne remercierons jamais assez pour ce qu’il nous aura apporté à ce moment-là : la chance d’accepter Helly sur notre cordée pour tenter l’aventure ensemble.
Nous aurons l’occasion de faire plusieurs sommets de 4000m à ses côtés avant de prendre notre envol vers l’autonomie en course glaciaire : cela nous aura permis d’apprendre à nous faire confiance, de maitriser davantage la lecture de ce milieu qui peut s’avérer hostile, de déterminer la meilleure façon de procéder pour évoluer ensemble à plus de 4000m d’altitude.
Nous avons à ce jour un total de 5 ascensions à plus de 4000m d’altitude réalisés avec Helly dont vous pouvez retrouver les topos complets. D’autres sont prévus au programme pour cette année ou la suivante qui pourrait être notre dernière dans cette discipline avec elle au regard de son âge.
Le matériel pour l’alpinisme canin
- Le harnais d’hélitreuillage/portage Julius
- Le harnais d’alpinisme canin Ruffwear Double-Back
- Les bottines Polar Trex Ruffwear
- Le masque à visière fumée Rex Specs
- Le matériel divers
Le harnais d’hélitreuillage
Pour franchir une échelle sur une randonnée et éviter de laisser son chien toute la journée à la maison pour un passage technique de 3 minutes, il existe un harnais spécifique de portage dit d’hélitreuillage de la marque Julius – couleur noire taille L/XL pour Helly -. Si on affectionne pas particulièrement leurs harnais de base, il faut avouer que celui-ci a le mérite d’être hyper sécure et bien pensé pour l’exercice. Et de toute façon, c’était le seul qui existait au moment de notre recherche pour le monde civil puisque les autres harnais en France de ce type sont destinés aux militaires. Nous en avons vu désormais passer un autre depuis notre achat.
Il se présente comme un cartable pour l’humain porteur. Pour le chien, on lui enfile par les 4 pattes et le ventre pour venir le refermer sur le dos avec 4 clips très résistants.
Attention, ce harnais n’est pas destiné à rester au fond du sac en cas de secours, il est encombrant et pèse 3kg pour notre modèle, les passages techniques doivent donc être checkés sur un topo avant d’aller randonner pour le prendre uniquement à cette occasion-là. Pour le secours, privilégiez plutôt le Fido pro qui est léger et mais pas du tout adapté pour l’aérien, ce sont bien deux utilisations distinctes.
Enfin, il faut prendre conscience que porter son chien n’est pas anodin et peut être lourd de conséquence sans entraînement : votre chien peut avoir peur et chercher à sortir du harnais, provoquant un déséquilibre ou vous pouvez encore vous rendre compte de l’intensité de l’exercice physique une fois sur l’échelle. Nous recommandons donc d’être particulièrement vigilant si vous tentez cette aventure. Pour plus de sécurité, vous pouvez coupler ce harnais avec un baudrier pour vous et une longe double pour se vacher ou être vaché par un coéquipier sur les barreaux.
Le harnais d’alpinisme canin Ruffwear Double-Back
Parfois, il ne s’agit pas de franchir une échelle que le chien ne pourrait être en mesure de passer seul mais plutôt de sécuriser sur une arête très aérienne ou encore protéger d’une éventuelle chute dans une crevasse sur course glaciaire. C’est un choix en âme et conscience qui doit être posé si vous souhaitez accéder à ce type de terrain technique et auquel vous seul pourrez répondre : devez-vous attacher votre chien ou le détacher sur les passages délicats ? Le laisser détaché, c’est prendre le risque de le voir tomber et l’attacher c’est prendre le risque de ne pas réussir à le retenir et de basculer avec lui.
En alpinisme canin, c’est tout simplement obligatoire d’encorder son chien : les cordées humaines se protègent des chutes possibles en crevasses et il va de soit que votre chien subit ces mêmes risques que vous lui imposez. L’encordement est un exercice périlleux qui demande beaucoup de confiance et d’écoute mutuelle.
Un harnais classique type Ruffwear flagline ou encore Non Stop Dog-Wear Rock Court n’est pas destiné à résister à une chute de plusieurs mètres, les clips lâcheraient probablement sous le poids du chien multiplié par la chute elle-même. Il en va de même d’une simple laisse ou longe dont l’objectif n’est pas de pouvoir assurer un chien dans ces conditions.
Nous avons trouvé deux harnais d’alpinisme canin et notre choix s’est porté sur le harnais Ruffwear Double Back. Pourquoi ? Parce que c’est le seul pour lequel il existe une fiche technique accessible mentionnant une résistance à la rupture en cas de chute de 900KG. Il ne possède aucun clip de fermeture et est pensé comme un harnais d’escalade. Une partie amovible permet d’englober ou non les pattes arrières. C’est un harnais qui permet à la fois de retenir une chute et à la fois de descendre son chien en rappel en cas de besoin.
La configuration du harnais après l’avoir essayé nous semble idéale pour ce type d’exercice mais à porter de manière limitée dans le temps. Il ne pourrait être utilisé comme harnais quotidien pour éviter d’abimer les coutures et de le rendre moins sécurisant mais aussi parce qu’il est malgré tout plus lourd que le Ruffwear flagline et la partie arrière peut gêner la marche fluide d’un chien à long terme. Encore une fois, ce type de harnais est donc à réserver pour les sorties spécifiques en terrain technique.
Les bottines ou chaussons
Pour marcher dans la neige, pour des chiens sensibles des coussinets, pour les revêtements délicats ou terrains à la roche saillante ou encore pour protéger en cas de blessure d’une pattoune, on a investi dans des bottines Ruffwear Polar Trex – toujours en vendant un rein -. On avait acheté des chaussons du même type sur Amazon pour essayer sans y mettre le prix et on s’est retrouvé confronté au résultat inverse de ce que l’on souhaitait : puisqu’ils n’étaient pas étanches comme il était pourtant indiqué, cela finissait par lui geler les pattes de l’intérieur au lieu de l’en prémunir. On conseille les Ruffwear qui sont certes très chers mais de très bonne qualité. Attention au moment de l’achat, le lot est de deux chaussons et non quatre comme on pourrait s’y attendre. Cela permet de différencier la taille des pattes avant et des pattes arrières et effectivement, Helly porte un 2.75 devant et un 2.5 derrière.
Attention : les bottines Ruffwear ne sont pas du tout adaptées pour la pratique de l’alpinisme sur neige dure ou glace. En effet, le chien patine, la semelle en Vibram n’est d’aucune utilité puisque cela ne cramponne pas et en pente raide cela peut être très dangereux. Il vaut mieux laisser les griffes faire leur boulot.
Le masque
Sur glacier, on conseille vivement pour protéger les yeux de votre compagnon d’aventure de lui faire porter un masque. On a investi dans la marque Rex Specs avec une visière claire et une visière fumée au même titre que nous portons des lunettes de glacier pour les humains.
Le matériel pour grimper : corde et mousquetons
Nécessairement avec le harnais d’alpinisme canin, il faut envisager une corde : on vous suggère la corde BEAL Opéra 8,5mm à la coupe, ce qui vous permet d’acheter la longueur souhaitée. On est parti sur 30 mètres de corde pour un poids de 48 grammes par mètre – maintenant vous comprenez pourquoi on est parti sur ce modèle : c’est l’un des plus léger du marché -. On va investir dans 50m de corde pour permettre davantage de liberté entre les membres de la cordée.
Pour l’humain, un harnais d’alpinisme avec un mousqueton, un bloqueur pour faciliter l’utilisation de la corde comme une laisse en bloquant ou laissant du mou à volonté et enfin à votre guise des anneaux cousus, broches à glace, mousquetons supplémentaires, etc. en fonction de vos habitudes d’assurage.
Pour le rappel, il est nécessaire d’avoir une dégaine pour attacher la partie dorsale à la partie arrière en sécurité supplémentaire.
L’entrainement
En vivant dans les Alpes, Helly a nécessairement une endurance importante de par le mode de vie que nous avons adopté, à savoir une à deux randonnées au minimum par semaine au delà des balades de dépense quotidiennes.
Dans ce cadre, nous avons d’abord pu appréhender différents aspects de la haute montagne par l’ascension d’une vingtaine de sommets culminant à plus de 3000m avant de nous lancer sur l’alpinisme canin. En effet, il est important de bien connaitre son chien dans des conditions particulières pour envisager de monter plus haut. Les 3000m permettent souvent à la fois d’augmenter le dénivelé, le kilométrage, l’altitude mais aussi le côté technique d’une randonnée : nombre d’entre eux sont accessibles par le biais de pierriers, de crêtes ou d’arêtes rocailleuses et c’est ainsi que l’on gagne à la fois en endurance et en confiance avec son chien.
Concernant les arêtes, on s’est vite rendu compte qu’il fallait la sécuriser sur des passages pouvant se révéler dangereux pour un chien sans l’être trop pour un humain. Étant plutôt à l’aise avec les passages aériens, j’ai entrepris de travailler avec Helly l’aisance et l’écoute indispensables pour les franchissements de ce type. Pour ce faire, le point le plus important me semble être l’association du matériel avec l’exercice technique pour le chien. C’est-à-dire qu’on équipe Helly de son harnais d’alpinisme uniquement lorsque nous allons soit nous entrainer soit être en conditions réelles sur une arête ou en alpinisme sur course glaciaire. Et de fait, elle semble avoir compris qu’avec ce matériel précis, il se passe quelque chose et qu’on attend d’elle une écoute parfaite ou presque.
Lorsque nous franchissons une arête, je me mets dans une bulle : on ne me parle qu’en cas d’extrême urgence, j’ai besoin d’être parfaitement concentrée sur Helly. Je la drive avec des ordres simples en lui parlant constamment : “tu m’attends”, “c’est bien”, “doucement”, “stop” que je répète en fonction de ce que j’attends d’elle. Elle se place toujours devant de manière à ce que je puisse tout anticiper : si elle était derrière, je ne verrai pas arriver une potentielle chute et pourrait tomber avec elle plutôt qu’être en capacité de la retenir.
Pour s’entrainer, on a très simplement été dans des endroits relativement safe avec un peu de vide mais sans grand danger type crête assez large et j’ai mis en place ces ordres pour voir comment elle évoluait. Lorsqu’elle porte le harnais d’alpinisme, elle est beaucoup plus calme et concentrée que lorsqu’elle est en libre ou en laisse simple – dont elle n’a pas l’habitude -. Elle avance de quelques pas puis s’arrête pour me laisser avancer de manière à ce qu’on évolue doucement sur la zone à risque.
La communication est réellement importante : si je me tais trop longtemps pendant que je descends un ressaut rocheux par exemple, elle pourrait être tentée – et elle l’a déjà fait – de se retourner pour venir me voir. Or, certains passages ne permettent pas le retournement au risque de chuter. Le simple fait de lui parler en lui disant que “c’est très bien” lui permet de continuer d’avancer sans crainte.
Il est nécessaire d’être progressif dans l’apprentissage d’un franchissement d’arête ou de passage difficile : votre chien peut avoir peur et c’est bien normal puisqu’il va puiser dans vos propres émotions. Si vous êtes stressé.e, il le sera, ne négligez pas cet aspect-là pour vous lancer sur ce type d’ascension. Si au contraire vous maitrisez la situation sereinement, il y a des chances que cela le rassure et qu’il vous suive les yeux fermés. Attention cependant au vertige de certains chiens, cela peut se travailler mais ne le poussez pas au delà de ses propres limites pour votre plaisir personnel, cela irait à l’encontre même de l’idée de partager ces moments avec son chien si vous êtes le seul à en profiter.
Enfin, une bonne condition physique autant pour vous que pour votre chien vous permettra d’endurer plus facilement une longue ascension : un 600D+ en alpinisme est bien plus long qu’en randonnée à 2000m d’altitude et il faut être en capacité d’encaisser pour bien gérer son chien. Gardez en tête que vous parlerez régulièrement voir constamment à votre chien pour le driver sur la trace et pendant 10H, vous allez finir par bégayer avec l’altitude. C’est du vécu et cela demande énormément d’endurance puisque vous ne franchissez pas seulement vous-mêmes la barre des 4000m, vous y emmener votre chien et vous vous devez d’être présent pour lui et de le guider pour que cela se passe bien.
Dans la même idée, la gestion du poids du chargement pour l’ascension est à prendre en considération : le matériel d’alpinisme est lourd de manière générale et à cela, vous rajouterez le matériel de votre chien et peut-être du matériel de bivouac hivernal puisque malheureusement très peu de refuges acceptent les chiens. Quand bien même vous pourrez planquer les affaires au petit matin pour partir plus léger ou laisser la tente montée selon l’ascension et la fréquence des passages, vous devrez tout de même la monter et le tout cumulé peut réellement devenir contraignant. Exemple : pour le Bishorn nous étions chargés à 16.5kg pour Alice, 17.5kg pour Brice, 3kg pour Helly sur 1600D+ avant de poser la tente. Il est donc important d’être en capacité de porter lourd et on vous met en lumière le fait qu’à 3000m déjà, on souffle pas mal avec un gros sac à dos sur le dos.
Nos conseils
L’altitude
L’altitude peut provoquer le mal des montagnes chez les chiens de la même façon que chez les humains. Il est tentant de vouloir partir directement à 4000m mais ne négligez pas l’impact de l’altitude sur les aspects physiques et physiologiques de votre chien dans votre recherche d’adrénaline. En effet, si vous ne le connaissez pas sur une hauteur de 3000 à 3747m – altitude de la Grande Sassière, qui est la plus haute randonnée d’Europe accessible l’été -, vous ne saurez pas repérer les éventuels signaux de faiblesse qu’il vous montrera. Il y a fort à parier que vous serez vous-mêmes bien concentrés sur votre ascension, surtout si vous êtes novices en la matière et c’est d’ailleurs pourquoi on vous conseille de faire au moins un premier 4000m sans chien pour vous tester.
Le chien n’ayant pas la capacité de parler, il vous faudra être attentif à un changement de comportement : essoufflement, titubation, se couche à chaque arrêt voir refuse d’avancer, etc. Cela étant dit, si le chien peut souffrir du mal des montagnes comme les humains, il profite également des effets d’une bonne acclimatation : comme pour nous, le fait de monter régulièrement à 3000m d’altitude permet d’augmenter le volume de globules rouges qui amènent l’oxygène aux organes vitaux. En effet, puisqu’il y a un manque d’oxygène, votre corps cherche à compenser en produisant davantage de petits soldats pour moins subir les effets du manque. Donc grosso modo, votre premier 3000m sera plus difficile que votre second qui sera plus difficile que votre troisième, etc. Cette surproduction de globules rouges reste dans votre corps jusqu’à 120 jours, soit 4 mois. D’où l’intérêt de faire 1 ou 2 sommets à cette altitude avant de monter à 4000m, cela permettra à tout le monde de moins souffrir en termes de souffle, votre chien compris.
La maturité
La maturité de votre chien est également indispensable à la réussite de votre ascension. Nous n’aurions jamais pu emmener Helly avant ses 3 ans au minimum sur ce type de challenge et encore, nous sommes heureux de l’avoir fait à ses 5 ans. C’est bien cette maturité qui conditionne son comportement à l’heure actuelle et la facilité avec laquelle nous évoluons ensemble sur les hautes cimes. Un jeune chien serait incapable de rester 10H d’affilées sur une même trace et pourtant c’est obligatoire au regard du risque de chute dans une crevasse possible en s’écartant de la trace. De la même façon, un crampon est tranchant et pour l’avoir vu en live sur un chien – qui n’était pas Helly -, il peut transpercer intégralement la patte de votre chien. Autant vous dire que cela vous coûtera cher de faire venir un hélicoptère pour l’évacuer si votre chien ne se contrôle pas et vous saute dessus sans arrêt, par exemple.
Ne soyez pas trop impatient même si vous rêvez de grandeur, cela vous facilitera réellement la vie et vous permettra de profiter pleinement de ce moment ensemble : trop de personnes veulent chercher le trophée du 4000m avec leur chien sans prendre en considération l’ensemble des paramètres et bizarrement, ils ne montreront jamais sur les réseaux les éventuelles catastrophes auxquelles ils auront dû faire face.
Cela implique également d’avoir conscience que la période d’accès à l’alpinisme avec un chien est relativement courte : trop jeune = trop dangereux, trop vieux = trop intense. Il faut en profiter et être prêt au bon moment finalement !
La tolérance
Dans la même idée, votre chien doit impérativement être tolérant avec les humains mais aussi les autres chiens. Il faut imaginer que sur des pentes raides où une seule trace existe, vous allez effectuer de nombreux croisements. Votre chien va nécessairement attirer des mains tendues de personnes qui sont très surprises de le voir ici et chercheront à le câliner, notamment en Italie où ils sont très dogfriendly et expressifs en voyant Helly par exemple. Ne pensez pas faire de la pédagogie ou pouvoir les empêcher de le faire si votre chien est réactif, vous allez partir au carton. Egalement, vous pourrez croiser d’autres chiens même si cela est rare : quand bien même ils sont encordés – normalement -, vous pouvez encore une fois effectuer un croisement sur un sentier de 50cm de largeur. Un chien réactif dans un couloir de 40° peut provoquer un accident mortel en vous emportant avec lui.
Deux exemples
Notre guide de haute montagne, qui doit avoir 35 ans de carrière dans le métier, après avoir nous avoir encadré sur l’ascension du Breithorn avec Helly, nous racontera avoir croisé pour la première fois de sa vie un autre chien type nordique sur le même sommet quelques semaines plus tard. Lors d’un croisement alors même qu’il n’a pas essayé de rentrer en contact avec le chien, ce dernier a du se sentir étriqué entre tous ces humains sur un espace réduit et il s’est jeté sur sa main en mordant, fort heureusement, son gant d’alpinisme. Il est INTOLÉRABLE d’avoir ce type de comportement de la part d’un chien sur une course glaciaire. Parce que les conséquences peuvent être bien plus importantes que sur une randonnée classique : si le guide avait eu la main transpercé, qu’aurait-il fait de ses clients pendant le secours ? Outre le fait que cela fait passer la communauté des chiens alpinistes pour des guignols et n’encouragent clairement pas les gens à accepter cette pratique peu courante.
Le second fait divers inquiétant s’est passé récemment et encore une fois, sur l’ascension du Breithorn : forcément, il attire de nombreux novices puisque si depuis l’Italie, il y a 600D+, depuis la Suisse on tombe à 350D+. Fort tentant pour des gens… qui n’ont rien à faire là. Toujours est-il qu’un italien qui fait régulièrement de l’alpinisme avec son chien a assisté à l’attaque d’un autre chien sur le sien sur l’arête sommitale. L’alpiniste italien a littéralement chuté par terre et a fini par séparer les chiens en se jetant dessus… tout ça face à une pente de 40°. Nous sommes scandalisés par ce type d’accident qui ne doit pas arriver en haute montagne. Emmener un chien réactif humain ou congénère sur des courses glaciaires ou des arêtes est trop dangereux pour la sécurité de chacun.
D’autant plus que pour ces deux exemples, la seule personne en tort est le maître : les chiens ne mordent jamais par plaisir et devaient être terrorisés dans des conditions inhabituelles qui les mettent dans un sentiment d’insécurité total.
Le matériel
Enfin, ne lésinez pas sur le matériel : l’alpinisme de manière général coûte cher. Partir avec un guide de haute montagne coûte très cher mais permet d’apprendre dans de bonnes conditions et s’équiper intégralement déjà en tant qu’humain vous fait vendre un rein. De la même manière, le harnais d’alpinisme canin coûte quasiment 200€, au delà d’avoir sa propre corde d’alpinisme pour laquelle il faut sortir la même somme. Si vous envisagez un jour de partir en autonomie, il faudra rajouter aux classiques baudrier, casque, piolet, crampons du matériel de secours pour les crevasses avec plusieurs mousquetons, bloqueurs, poulie micro traxion, broche à glace, anneau cousu, etc.
Tout cela pour dire que l’alpinisme ne s’improvise pas. C’est peut-être rageant mais il existe des moyens de se former à moindres coûts, en louant son matériel au début et en s’intégrant dans des groupes de stage d’alpinisme type UCPA ou Compagnie des Guides de Chamonix par exemple. Et petit à petit, vous pourrez vous offrir tout le nécessaire pour partir en toute sécurité. Nous avons croisé plusieurs chiens en alpinisme et rare étaient ceux bien équipés : des harnais quotidiens, qui pourraient céder à la moindre chute dans une crevasse, des laisses basiques, pas de masque. Alors même que le maître derrière porte ses lunettes de glacier, un baudrier d’alpinisme/escalade et est encordé sur ses camarades par une corde d’alpinisme. C’est bien peu de considération pour son compagnon à quatre pattes nous semble-t-il.
La liste de nos ascensions et le mot de la fin
Franchir la barre des 4000m avec son chien est une immense fierté. Le faire dans les bonnes conditions et la voir évoluer si facilement sur ces hauteurs en est une autre. Nous vous souhaitons de suivre un jour les traces d’Helly et que cette expérience, si subjective soit-elle, puisse vous servir dans vos projets de grandeur avec votre compagnon.
Les 4000m
- Breithorn – 4165m
- Piramide Vincent – 4215m
- Allalinhorn – X2 – 4027m
- Punta Gnifetti – 4554m
- Bishorn – 4151m
Les autres ascensions d’alpinisme
- Bivacco Gervasutti
- Tête du Ruitor
Certaines randonnées dîtes alpines demandent une attention particulière – le Grand Galibier, le Jallouvre, le Pas de la Demi-Lune par exemple – et tous nos topos vous indiquent si nous avons utilisé du matériel spécifique ou s’il y a une vigilance accrue à avoir sur un passage en particulier.
Vous pourrez trouver ici la liste et les topos complets de nos ascensions d’alpinisme.
N’hésitez pas à nous laisser un commentaire et à nous contacter si vous avez des questions supplémentaires !